Les lézards, avec les serpents et les amphisbènes*, font partie du groupe (ou ordre) des Squamates, autrement dit les "reptiles à écailles" ("squama"signifiant "écaille" en latin).
Les lézards sont facilement reconnaissables par le grand public : un corps allongé et tapissé d'écailles, deux paires de pattes, et l'absence d'oreille externe, ils ne possèdent, en effet, que deux orifices sur les côtés de la tête.
En fait, le terme "lézard" est un peu ambigu, il englobe de nombreuses familles auxquelles font partie les gekkos, les tarentes, les seps, les hémidactyles ou bien les lézards au sens strict ! Dans le langage courant, le "lézard" est un Squamate appartenant à la famille des Lacertidés dont font partie le célèbre lézard des murailles (Podarcis muralis) que l'on croise partout dans les jardins, villes et autres milieux, ou bien le lézard vert occidental (Lacerta bilineata) que j'ai déjà eu l'occasion de vous présenter sur ce blog (l'article est à lire ou relire ici !). Ainsi, en France métropolitaine, nous dénombrons une petite quinzaine d'espèces de Lacertidés. Et celle que je souhaite vous présenter aujourd'hui est le lézard ocellé (Timon lepidus) !
Lézard ocellé (Timon lepidus) - Pompignan, Gard (30) |
En moyenne, la longueur du lézard ocellé varie entre 50 cm et 70 cm pour les mâles et entre 40 cm et 50 cm pour les femelles (queue comprise !), même si certains spécimens de 90 cm ont déjà été observés, cela restant rare ! Ses mensurations justifient bien sa qualification de lézard le plus grand d'Europe ! En dépit de certaines légendes relatant qu'il attaque les viticulteurs dans leurs champs de vignes, le lézard ocellé est un reptile assez farouche. Alors n'ayez crainte, il y a plus de chances que ce soit lui qui vous repère le premier et fuit dans les broussailles !
Pour comprendre le sens de son nom vernaculaire, il faut se focaliser sur la couleur et les motifs de sa robe écailleuse. Son corps est de couleur vert brillant, ponctué de plusieurs ocelles bleus. Enfin, ces teintes concernent plutôt les adultes. A l'état juvénile, Timon lepidus est, à l'inverse des adultes, de couleur brune, toujours ornée d'ocelles, mais blancs cette fois-là. Au cours du temps, le jeune mue et sa robe se rapproche de celle de ses parents.
Quant au dimorphisme sexuel (c'est-à-dire la différence visuelle entre mâle et femelle), il est légèrement marqué. Globalement, le mâle est plus gros et long, sa tête est plus massive et robuste, puis son corps est plus vivement coloré. Il y aurait également une histoire du nombre d'écailles ventrales différent selon le sexe, mais il pourrait varier selon les sous-espèces et les individus, bref, restons sur les caractères bien plus visibles à l’œil nu sans avoir à manipuler la pauvre bête !
L'aire de répartition du lézard ocellé s'étend du Nord-Ouest de l'Italie jusqu'au détroit de Gibraltar, en passant par le Sud de la France (Provence, Languedoc-Roussillon, vallée du Rhône), l'Espagne et le Portugal. Il est aussi présent localement dans le Massif central et dans les Landes et la Gironde.
Ce reptile affectionne les milieux ouverts et ensoleillés, principalement les garrigues et les pelouses rocailleuses parsemées d'arbustes. Il peut ainsi trouver refuge dans les terriers de lapins abandonnés ou dans les anfractuosités de la roche, où il peut aussi se nourrir et réguler sa température interne. En effet, l'ombre et l'hygrométrie apportées par l'abri permettent par exemple d'abaisser sa température corporelle.
Ah et puisqu'on parle de bouffe, que mange-t-il exactement ? Le lézard ocellé est essentiellement insectivore, il se nourrit principalement de Coléoptères, d'Orthoptères (criquets, sauterelles, grillons) et autres insectes. Mais, ne nous le cachons pas, s'il a la possibilité de se mettre un escargot, une limace ou une araignée sous la dent, il le fera ! De même, si l'opportunité se présente à lui, il peut se sustenter de quelques fruits comme ceux du Genévrier, par exemple, un arbuste commun dans les garrigues, mais pas seulement ! Egalement de quelques petits rongeurs, d'oisillons, d'amphibiens ou de petits reptiles. Enfin, il arrive aux adultes de se nourrir de quelques juvéniles qui auraient le malheur de croiser leur chemin... Excellent.
Il est vrai que la présence de galeries ou de trous dans les roches puissent les protéger face à des attaques furtives de Circaètes Jean-le-Blanc (Circaetus gallicus), de Buses variables (Buteo buteo) ou de Milans noirs (Milvus migrans) qui roderaient dans les airs ou encore des Couleuvres de Montpellier (Malpolon monspessulanus) qui vadrouilleraient dans les parages... De même, certains animaux plus opportunistes, tels que les sangliers ou les rats, pourraient aussi s'en nourrir. En fait, comme de nombreux reptiles, le Lézard ocellé est au centre de la chaîne alimentaire. S'il venait à disparaître, il en découlerait quelques conséquences écologiques importantes...
En France, les populations de ce lézard sont en déclin, comme le montrent certains chiffres. Sur les 3 dernières générations (15 à 18 ans), la population nationale aurait connu une réduction de 30%. Certaines populations historiques se sont même éteintes à quelques endroits, c'est le cas de l'île de Porquerolles... Les raisons de cette diminution drastique de l'effectif à l'échelle nationale sont multiples. Parmi elles, les principales causes sont la fragmentation de son habitat due à l'urbanisation des zones naturelles et la fermeture progressive des milieux (par la reforestation par exemple). Mais c'est pas tout ! Ces dernières années, les populations de lapins de Garenne ne cessent de décroître, du fait de l'urbanisation et des maladies virales (comme la myxomatose). Or, si vous avez été attentif, précédemment, j'écrivais que Timon lepidus profitait malignement des terriers creusés par les lapins en guise d'abri. Et donc, moins de lapins > moins de terriers > moins d'abris > les lézards ocellés s'avèrent plus vulnérables... Un autre exemple, dans la plaine de la Crau cette fois, illustrant la diminution des effectifs de cette espèce de reptile en France concerne l'utilisation de vermifuges* par les éleveurs pour protéger leur bétail contre les parasites. Une fois le médoc' ingéré par le mouton, ses fèces sont contaminées et inévitablement consommées par des Coléoptères coprophages*, constituant un élément essentiel du régime alimentaire du Lézard ocellé. Voilà ce dernier contaminé aussi...
A tout cela s'ajoute le ramassage illégal du lézard pour décorer les terrariums.
Bref, tous ces phénomènes expliquent de façon évidente la décimation des populations du Lézard ocellé. Pour tenter d'y remédier, un Plan National d'Action (PNA) a été élaboré dans l'optique de restaurer les populations viables.
Ainsi, le Lézard ocellé est considéré comme "quasi-menacé" (NT) sur la liste rouge mondiale de l'UICN au niveau européen et "vulnérable" (VU) sur la liste rouge française.
Selon les scientifiques, il existerait en Europe 4 sous-espèces de Timon lepidus, c'est-à-dire des groupes d'individus qui échangent très peu de gènes entre eux (ie qui se reproduisent très peu entre eux). Ainsi, la sous-espèce la plus commune, que l'on croise en France, en Italie, et dans la grande partie de la péninsule ibérique, est Timon lepidus lepidus. Les autres sous-espèces se trouvent au Sud-Est de la péninsule ibérique et au niveau de la Galice. La dernière, quant à elle, est endémique d'une île de la Galice.
Voilà, j'espère vous avoir appris quelques choses sur ce joli lézard à l'apparence si robuste mais si fragile en réalité. Protégeons-le !
A bientôt sur l'Odyssée Terrestre !
Lexique :
- Amphisbène : reptile ressemblant à un serpent mais qui a un mode de vie fouisseur (sous terre !).
- vermifuge : ici, le vermifuge en question dans la plaine de la Crau est l'ivermectine, un médicament utilisé pour traiter les parasites comme la gale.
- coprophagie : traduit la consommation de matières fécales.
Sources :
- inpn.mnhn.fr/accueil/index
-inpn.mnhn.fr/docs/LR_FCE/Rapport-Eval-Reptiles-Amphibiens-metropole_Actualisee-16-01-2017.pdf
- www.cenlr.org/sites/www.cenlr.org/files/documenst_communs/rnrgg/Compte_rendu_Lézard_ocellé_RNRGG_2014.pdf
- photo lézards ocellés mâle et femelle : Gabriel Gonzalez (www.flickr.com/people/gaby1/).
- base de données des reptiles : reptile-database.reptarium.cz/
- Guide Delachaux des Amphibiens et Reptiles de France et d'Europe, de Speybroeck Jeroen (2018). Edition DELACHAUX & NIESTLE.
Quant au dimorphisme sexuel (c'est-à-dire la différence visuelle entre mâle et femelle), il est légèrement marqué. Globalement, le mâle est plus gros et long, sa tête est plus massive et robuste, puis son corps est plus vivement coloré. Il y aurait également une histoire du nombre d'écailles ventrales différent selon le sexe, mais il pourrait varier selon les sous-espèces et les individus, bref, restons sur les caractères bien plus visibles à l’œil nu sans avoir à manipuler la pauvre bête !
Une femelle (à gauche) et un mâle (à droite) |
L'aire de répartition du lézard ocellé s'étend du Nord-Ouest de l'Italie jusqu'au détroit de Gibraltar, en passant par le Sud de la France (Provence, Languedoc-Roussillon, vallée du Rhône), l'Espagne et le Portugal. Il est aussi présent localement dans le Massif central et dans les Landes et la Gironde.
Ce reptile affectionne les milieux ouverts et ensoleillés, principalement les garrigues et les pelouses rocailleuses parsemées d'arbustes. Il peut ainsi trouver refuge dans les terriers de lapins abandonnés ou dans les anfractuosités de la roche, où il peut aussi se nourrir et réguler sa température interne. En effet, l'ombre et l'hygrométrie apportées par l'abri permettent par exemple d'abaisser sa température corporelle.
Ah et puisqu'on parle de bouffe, que mange-t-il exactement ? Le lézard ocellé est essentiellement insectivore, il se nourrit principalement de Coléoptères, d'Orthoptères (criquets, sauterelles, grillons) et autres insectes. Mais, ne nous le cachons pas, s'il a la possibilité de se mettre un escargot, une limace ou une araignée sous la dent, il le fera ! De même, si l'opportunité se présente à lui, il peut se sustenter de quelques fruits comme ceux du Genévrier, par exemple, un arbuste commun dans les garrigues, mais pas seulement ! Egalement de quelques petits rongeurs, d'oisillons, d'amphibiens ou de petits reptiles. Enfin, il arrive aux adultes de se nourrir de quelques juvéniles qui auraient le malheur de croiser leur chemin... Excellent.
Exemple de milieu fréquenté par le lézard ocellé |
En France, les populations de ce lézard sont en déclin, comme le montrent certains chiffres. Sur les 3 dernières générations (15 à 18 ans), la population nationale aurait connu une réduction de 30%. Certaines populations historiques se sont même éteintes à quelques endroits, c'est le cas de l'île de Porquerolles... Les raisons de cette diminution drastique de l'effectif à l'échelle nationale sont multiples. Parmi elles, les principales causes sont la fragmentation de son habitat due à l'urbanisation des zones naturelles et la fermeture progressive des milieux (par la reforestation par exemple). Mais c'est pas tout ! Ces dernières années, les populations de lapins de Garenne ne cessent de décroître, du fait de l'urbanisation et des maladies virales (comme la myxomatose). Or, si vous avez été attentif, précédemment, j'écrivais que Timon lepidus profitait malignement des terriers creusés par les lapins en guise d'abri. Et donc, moins de lapins > moins de terriers > moins d'abris > les lézards ocellés s'avèrent plus vulnérables... Un autre exemple, dans la plaine de la Crau cette fois, illustrant la diminution des effectifs de cette espèce de reptile en France concerne l'utilisation de vermifuges* par les éleveurs pour protéger leur bétail contre les parasites. Une fois le médoc' ingéré par le mouton, ses fèces sont contaminées et inévitablement consommées par des Coléoptères coprophages*, constituant un élément essentiel du régime alimentaire du Lézard ocellé. Voilà ce dernier contaminé aussi...
A tout cela s'ajoute le ramassage illégal du lézard pour décorer les terrariums.
Bref, tous ces phénomènes expliquent de façon évidente la décimation des populations du Lézard ocellé. Pour tenter d'y remédier, un Plan National d'Action (PNA) a été élaboré dans l'optique de restaurer les populations viables.
Ainsi, le Lézard ocellé est considéré comme "quasi-menacé" (NT) sur la liste rouge mondiale de l'UICN au niveau européen et "vulnérable" (VU) sur la liste rouge française.
Lézard ocellé (Timon lepidus) |
Voilà, j'espère vous avoir appris quelques choses sur ce joli lézard à l'apparence si robuste mais si fragile en réalité. Protégeons-le !
A bientôt sur l'Odyssée Terrestre !
Lexique :
- Amphisbène : reptile ressemblant à un serpent mais qui a un mode de vie fouisseur (sous terre !).
- vermifuge : ici, le vermifuge en question dans la plaine de la Crau est l'ivermectine, un médicament utilisé pour traiter les parasites comme la gale.
- coprophagie : traduit la consommation de matières fécales.
Sources :
- inpn.mnhn.fr/accueil/index
-inpn.mnhn.fr/docs/LR_FCE/Rapport-Eval-Reptiles-Amphibiens-metropole_Actualisee-16-01-2017.pdf
- www.cenlr.org/sites/www.cenlr.org/files/documenst_communs/rnrgg/Compte_rendu_Lézard_ocellé_RNRGG_2014.pdf
- photo lézards ocellés mâle et femelle : Gabriel Gonzalez (www.flickr.com/people/gaby1/).
- base de données des reptiles : reptile-database.reptarium.cz/
- Guide Delachaux des Amphibiens et Reptiles de France et d'Europe, de Speybroeck Jeroen (2018). Edition DELACHAUX & NIESTLE.
wow
RépondreSupprimerc et super